La loi Santé au travail, votée le 2 août 2021 s'apprête à entrer en vigueur. Objectif ? Renforcer la prévention en matière de santé au travail, moderniser les services de prévention et de santé au travail et décloisonner la santé publique et la santé au travail. Le point sur les mesures qui s'appliqueront progressivement à partir du 31 mars 2022.
Une visite médicale de mi-carrière
La nouvelle loi prévoit un examen médical de mi-carrière, organisé à une échéance déterminée par accord de branche, ou, à défaut, à l'âge de 45 ans. Cette visite obligatoire permettra :
• de vérifier l’adéquation entre le poste de travail et l'état de santé du travailleur, en tenant compte des expositions à des facteurs de risques professionnels auxquelles il a été soumis ;
• d’évaluer les risques de désinsertion professionnelle ;
• et de sensibiliser chaque travailleur aux enjeux du vieillissement au travail et à la prévention des risques professionnels.
"La visite médicale de mi-carrière peut être réalisée par un infirmier de santé au travail exerçant en pratique avancée. [...] A l'issue de la visite, l'infirmier peut, s'il l'estime nécessaire, orienter sans délai le travailleur vers le médecin du travail" (source 1).
Le contenu du Document Unique étoffé
Pour améliorer la prévention des risques au sein de l’entreprise, le contenu du Document Unique d’évaluation des Risques Professionnels sera étoffé. Pour rappel, ce document a pour objectif de répertorier l’ensemble des risques professionnels et d’assurer la traçabilité des expositions à risque. Les employeurs seront désormais soumis à de nouvelles obligations :
• dans les entreprises d’au moins 50 salariés : "un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail" devra être adopté dans le courant de l'année 2022 ;
• dans les entreprises de moins de 50 salariés : il s'agira de mettre en place un plan d’action "de prévention des risques et de protection des salariés". Une première, car jusqu’à présent, il n’existait aucune obligation similaire pour les petites entreprises.
Quelle que soit la taille de l'entreprise, le DUER devra être conservé par l’employeur pendant au moins 40 ans. Il sera accessible aux salariés de l’entreprise ainsi qu’aux anciens travailleurs qui soupçonnent un problème de santé d’origine professionnelle. Ces derniers pourront alors le consulter et le transmettre "aux professionnels de santé en charge de leur suivi", indique le texte de loi (source 1).
Le dépôt dématérialisé du Document Unique sur un portail numérique deviendra obligatoire à compter du 1er juillet 2023 pour les entreprises d’au moins 150 salariés, et du 1er juillet 2024 pour les autres.
De nouvelles obligations relatives au Document Unique
La loi santé impose de consulter le CSE sur le Document Unique et ses mises à jour.
Les entreprises devront désormais proposer :
-pour les entreprises d’au moins 50 salariés : un programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail ;
-pour les entreprises de moins de 50 salariés : un plan d'action de prévention des risques et de protection des salariés.
Mise en place de l’accès au dossier médical partagé
Le dossier médical partagé (DMP) permettra de mieux encadrer la santé du salarié et d'assurer une meilleure communication entre le médecin traitant et le médecin du travail.
Le médecin du travail aura accès à ce dossier avec l'accord du salarié, et uniquement avec son accord. Il pourra donc tout savoir de l'historique de santé du salarié. À l'inverse, le médecin traitant aura accès à toutes les informations sur les expositions à risque du salarié.
Rendez-vous de liaison, visites de préreprise et de reprise...
Le rendez-vous de liaison est un nouveau dispositif destiné à maintenir le salarié dans l’emploi. Il s'adresse aux collaborateurs en arrêt de travail à cause d’une maladie ou d’un accident et peut se tenir au bout de 30 jours d’absence, à l’initiative de l’employeur ou du salarié.
La visite de préreprise, actuellement organisée au bout de trois mois d’arrêt de travail, pourra dorénavant avoir lieu dès 30 jours d’arrêt.
La visite de reprise s'appliquera désormais :
• au retour du congé maternité, pour les salariées en suivi individuel renforcé de leur état de santé, ou à la demande de la salariée ou de l’employeur, ou encore lorsque le médecin du travail l’estime nécessaire
• au retour des absences pour maladie professionnelle ;
• au retour des absences pour accident du travail d'au moins 30 jours ;
• au retour des absences pour maladie ou accident non-professionnel d'au moins 60 jours
Les missions des services de santé au travail évoluent
Les services de santé au travail changeront de nom, pour devenir les services de prévention et de santé au travail. Ils endosseront de nouvelles missions et devront, notamment, apporter leur aide dans l’évaluation et la prévention des risques ou dans l’analyse de l’impact de changements organisationnels importants dans l’entreprise.
Une cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle sera intégrée dans ces services de prévention et santé au travail. Elle sera chargée de sensibiliser les salariés à la désinsertion, d'identifier les situations individuelles problématiques et en lien avec l'employeur et de proposer des mesures individuelles comme un changement de poste ou des aménagements propres à chaque situation".
Renforcement de la définition du harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel défini à l’article L.1153-1 du Code du travail peut désormais être également constitué :
-lorsqu’un même salarié subit des propos ou comportements (à connotation sexuelle ou sexiste) venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
-lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.
Risque chimique et contrôle des polyexpositions
En cas d’exposition à un risque chimique, chaque salarié fait l’objet d’un suivi médical renforcé.
A partir du 31 mars 2022, une attention particulière sera portée aux salariés se trouvant en situation de « polyexpositions », qui en interagissant, peuvent produire des effets susceptibles de présenter des risques aggravés pour la santé. Sont notamment inclus dans le champ de cette évaluation les effets des polyexpositions quels que soient les risques concernés telles que les expositions simultanées à des risques chimiques, au bruit et à des températures élevées.
Renforcement de la formation des élus
A compter du 31 mars 2022, la formation santé/sécurité des membres de la délégation du personnel du CSE sera de cinq jours minimum pour l'ensemble des membres du CSE. En cas de renouvellement du mandat d'au moins trois jours, sauf pour les membres de la CSSCT dans les entreprises d’au moins 300 salariés (au moins cinq jours).
Le projet de décret précise que les OPCO pourront prendre en charge les frais de formation, du salaire dans la limite du Smic horaire par heure de formation et des frais annexes (frais de transport, de restauration, d’hébergement etc.) pour les entreprises de moins de 50 salariés. Dans les entreprises d'au moins 50 salarié, la prise en charge est assurée par l'employeur.